• 3 septembre 1914

    3 septembre

     

    Les Allemands avancent. Des aéroplanes allemands – des « Taube » - survolent au-dessus de Paris et lancent des bombes sans causer de grands dégâts.

    Les dépêches officielles sont bien vagues, elles ne disent rien, il y a dedans « à boire et à manger ». Aussi - comme on ne sait rien - on invente. Cela est évident.

    Le gouvernement se plaint que des gens colportent des mauvaises nouvelles, que d’autres annoncent de fausses victoires. Que diable ! Que le gouvernement tienne donc les Français au courant et ils ne colporteront pas de fausses nouvelles ! Le gouvernement ne dit rien, absolument rien. Ni les défaites, ni les victoires.

    Que les projets de l’état-major ne soient pas dévoilés, je le comprends ; mais, sapristi ! D’annoncer que nos soldats ont remporté telle victoire, ont fait telle action d’éclat, je ne vois pas en quoi cela peut gêner la défense et en quoi nous devons cacher ces victoires à l’ennemi qui y était, et a des raisons de s’en rappeler et de le savoir.

    Drôle de choses !

    Alors, dame ! On dit qu’aux environs de Paris, on abat les maisons susceptibles de gêner les tirs, que les parcs, les arbres des routes, sont sacrifiés et impitoyablement flanqués à terre. C’est la ruine pour toute cette région.

    Je porte un beau panier de poires du jardin aux blessés soignés à l’ambulance de l’école normale des instituteurs. La sœur Saint Hilaire - des servantes de Marie - est cuisinière, assistée de la dévouée madame Galante ; le docteur Marchand médecin-major, que je fais demander, arrive tout de blanc vêtu, les manches retroussées, le képi rouge sur le crâne de la tête, il est en plein pansement de ses malades. Quelques-uns sont déjà en promenade dans le jardin. L’ensemble est bon. Le soir je reçois la lettre ci-dessous :

     

    « Société Française                             Blois, le 3 septembre 1914

    de Secours aux blessés

    des armées de terre et de mer

    5e région

    Hôpital auxiliaire n°1

    Pensionnat Sainte-Geneviève

    35, rue du Bourg-Neuf

    et

    École normale d’instituteurs

    Avenue Paul Renaulme

                              Monsieur

    Vous avez eu l’amabilité d’envoyer des fruits à l’hôpital de l’École normale.

    Permettez-moi de joindre mes remerciements à ceux de nos infirmières et de nos blessés, qui vous en sont très reconnaissants.

                                      L’administrateur

                                      Signé : L. Thoraux »

     

    Je suis heureux d’apprendre que mon modeste envoi a fait plaisir aux pauvres blessés ; je le renouvellerai.

    Il y a – à partir de ce soir -  adoration nocturne tous les jeudis - à la cathédrale - de 8h à minuit ; exceptionnellement - ce soir - en raison des circonstances graves - l’adoration aura lieu toute la nuit.

    Nous y allons - Robert et moi - y prendre notre part - de 9 h 45 à 10 h 45.

    En y allant nous apprenons - par une dépêche - que le nouveau Pape, élu par le conclave, qui vient de terminer ses assises, commencées lundi soir, est le cardinal Della Chiesa, archevêque de Bologne ; il prend le nom de Benoît XV. Vive Benoît XV !!

     

    Benoit XV_BNF

     

    Le pape Benoît XV qui vient d'être élu le 3 septembre 1914 [portrait].- Agence photographique Rol.- Gallica.bnf.fr / BNF, département Estampes et photographie, EST EI-13 (389)