• 3 novembre 1914

    3 novembre

    La Turquie ayant bombardé – sans déclaration de sa part – le port d’Odessa et des croiseurs russes, les ambassadeurs russes, anglais et français quittent Constantinople et la guerre est immédiatement déclarée et immédiatement commencée contre cette misérable Turquie, comparse de l’Allemagne. Était-ce à elle, si amoindrie, si malade, de se comporter ainsi ? Cette maladresse lui coûtera cher.

    Allons ! Cette horde de mauvais musulmans va, enfin, être chassée d’Europe et Constantinople va revoir la Croix ; le Croissant – à son dernier quartier – va sombrer dans la boue et le sang.

    Cette guerre est vraiment fertile en surprises !

    Et nous ne sommes pas au bout.

    Allemands, Autrichiens et Turcs recevront la raclée exterminatrice qu’ils méritent !

    Puisse la Croix briller à nouveau sur la coupole de Sainte-Sophie ! Puisse le Te Deum d’action de grâce et de victoire retentir sous les voûtes incomparables de la Basilique !! Puisse un nouveau Saint Jean-Chrysostome monter dans la chaire rétablie et exalter la Magnificence, la Bonté et la Gloire de Dieu !...

     

    6_Fi_159%00029 [1600x1200]

     

    Neung-sur-Beuvron.- L’église. Le Clocher.- 6 Fi 159/29. AD41

     

    Je vais – après-midi – avec mon auto (revenue en très bon état à son bercail) à Marcilly-en-Gault par la route habituelle ; il fait un temps idéal. A Neung-s/Beuvron je prends M. Roulet, entrepeneur de menuiserie ; il me donne de bonnes nouvelles de son frère, actuellement sergent, sur le front, en Lorraine.

    Le fils Tripault, par une lettre, relatée plus haut, m’avait demandé de lui écrire de venir à Marcilly, que j’avais absolument besoin de le voir pour les travaux. Pour lui être agréable j’avais acquiescé à sa demande. Il m’écrit :

    « Jeudi, 29 octobre 1914

                                  Monsieur Legendre

    J’ai attendu, jusqu’à ce jour, car le capitaine m’a seulement rendu réponse aujourd’hui ; il est absolument impossible d’avoir une permission pour n’importe quel endroit. Il ne me reste donc plus qu’à vous remercier de votre grande bienveillance, et, en vous remerciant encore une fois, agréez Mr Legendre, l’assurance de mes sentiments dévoués.

                                  Signé : Ludovic Tripault[1] »

    J’en préviens son père – un brave homme – qui ignorait la demande de son fils ; il regrette qu’il n’ait pu venir au pays.

    Je vais voir mes travaux du Dangeon qui vont bien péniblement, en raison des temps. M. Porcher-Seveau, l’entreprise de maçonnerie de Romorantin, est là.

    Au retour je m’arrête chez M. le curé de Marcilly qui – à M. Roulet et à moi – nous fait goûter à son vin nouveau.

    Vers 5 h ½, à la nuit qui commence, avec la lune superbe qui se lève, je suis à Blois.

    Après dîner je vais à la cathédrale, où – comme tous les mardis – a lieu la cérémonie habituelle faite spécialement pour les militaires ; l’abbé Rotier, aumônier de l’Hôtel-Dieu y prononce une allocution et Mgr l’évêque préside.

    [1] Je ne sais pas pourquoi sa première lettre était signée : Jules Tripault.