• 27 mars 1915

    27 mars 1915

    Ce matin il fait un vent et un temps froid glacial. Après le petit déjeuner – avec Paul – nous allons visiter les beautés de Blois ; je lui fais les honneurs de ma ville natale.

     

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    Blois.- La rue Pierre-de-Blois.- 6 Fi 18/730. AD41

     

    Nous allons par la rue Pierre-de-Blois, la cathédrale, la terrasse de l’évêché, la grand’ pièce, la halle, la préfecture, le palais de justice, Saint-Vincent-de-Paul. Puis nous rentrons déjeuner.

    Après nous allons visiter le château, sa terrasse, Saint-Nicolas, et nous rentrons par les quais.

    Paul, dont la feuille de convalescence est directe d’Angoulême à Nevers, craint pour sa sécurité ; aussi décide-t-il de partir ce soir à 5 h. Déjà !

    Il goûte avant de partir et je vais le reconduire à la gare. Il passe par Tours, Vierzon, Saincaize, Nevers.

    Le voilà parti. Son séjour n’a pas été long, mais il me fait croire qu’il reviendra peut-être.

    Bon voyage, mon cher Paul !

    Charlot, qui a bon cœur, tout le monde sait cela, m’avait prié d’envoyer à de ses amis encore dans les tranchées, un cache-nez et des chaussettes qui lui avaient été donnés. Je l’ai fait avec plaisir, en y ajoutant un autre cache-nez, quelques paquets de tabac, des rillettes, du papier à lettre. Le colis est arrivé à destination, car voici la lettre que je reçois des deux bons amis de Charles.

    « Belgique, 24 mars 1915

    Monsieur

    Ce matin, au retour des tranchées, nous avons eu une surprise des plus agréables ; un colis nous attendait.

    Il était arrivé depuis deux ou trois jours, mais ne pouvant recevoir nos correspondances pendant les quatre jours d’avant-postes, nous ne l’avons eu qu’aujourd’hui. Nous vous adressons nos plus sincères remerciements. C’est pour nous une grande joie de savoir qu’il y a, même au loin, des camarades et de bonnes personnes qui pensent à nous.

    Nous sommes surtout heureux que notre camarde et ami entre en convalescence, mais nous souhaitons qu’elle soit assez longue car les intempéries se font encore beaucoup sentir surtout cette dernière semaine pendant laquelle il a neigé. Le contenu du colis nous a réjoui, ici tout étant dévasté et abandonné, nous ne pouvons rien nous procurer. Le tabac surtout nous a causé un très grand plaisir, notre principale distraction consistant à fumer. Les cache-nez, chaussettes, papier à lettres, rillettes ont également été pour nous un grand sujet de joie, et encore une fois nous vous en remercions.

    Nous terminons en vous priant, monsieur, d’accepter l’expression de la reconnaissance de Poutas Roger, Le Pape Pierre, 1er régiment de fusiliers marins, 2e bataillon, 5e compagnie, 1ère section. Grand Palais, Paris. »

    Faire le bien – de loin –à de braves jeunes gens inconnus est un vrai bonheur.