• 25 août 1914

    25 août – 24e jour de la mobilisation

     

    Ce devrait être aujourd’hui un grand jour de foire à Blois et le commencement des foires de Saint-Louis. Il n’y a ni foire aux bestiaux, ni foires sur le mail. Il n’y a rien cette année.

    On ne pense même pas aux foires annuelles. Qui y penseraient ? Alors que nous sommes dans l’anxiété, que les morts et les blessés sont légion. Car on parle, hélas ! de morts nombreux. Et les ambulances blésoises sont prêtes et attendent les blessés qui vont arriver.

     

    6_Fi_018%01553 [1600x1200]

     

    Blois.- École normale [des instituteurs].- 6 Fi 18/1553. AD41

     

    La société de secours aux blessés a deux ambulances : une au pensionnat Sainte-Geneviève, rue du Bourg-neuf et une à l’école normale des garçons, rue Monin [av. Paul Reneaulme] ; la société des dames de France a deux ambulances également : une à l’école normale des institutrices, rue des écoles et une au collège Augustin-Thierry, rue du département.

     

    6_Fi_018%00678 [1600x1200]

     

    Blois.- Le Collège et les quais de la Loire.- 6 Fi 18/678. AD41

     

    Une ambulance est aussi installée au collège de Pontlevoy.

    Monseigneur a nommé aumôniers des ambulances de la Croix-Rouge

    1°/ Ambulances de la Société de secours aux blessés militaires.

    M. le chanoine Orain.

    M. le chanoine Gougeon.

    M. l’abbé Huré.

    2°/ Ambulances de l’Union des femmes de France.

    M. Le chanoine Augereau.

    M. l’abbé Clamet.

    Au cas où des blessés anglais seraient amenés à Blois, M. l’abbé Huré, aumônier de Ste-Geneviève et M. l’abbé Bruneau, maître de chapelle à la cathédrale, sont nommés confesseurs en langue anglaise.

    Au cas où des prisonniers ou des blessés allemands seraient amenés à Blois, M. l’abbé Berthier, professeur à l’École Notre-Dame-des-Aydes, est désigné comme confesseur en langue allemande. Sur la demande que M. le comte A. de Mun avait faite au gouvernement – et qui a été acceptée – et sur la proposition de monseigneur l’évêque de Blois – ont été nommés aumôniers militaires temporaires, chargés de suivre les armées, assister les soldats, leur administrer les sacrements :

    M. l’abbé Besnard, vicaire à la cathédrale.

    M. l’abbé Noulin, directeur au grand séminaire.

    M. l’abbé de la Barre, nouveau prêtre.

    Et par suite du départ de deux vicaires à la cathédrale, M. l’abbé Bruneau a été désigné par monseigneur pour faire fonctions de vicaire à la cathédrale pendant la durée de la guerre à la liste déjà publiée des prêtres mobilisés et mobilisables, la « Semaine religieuse » publie le supplément suivant :

    MM. l’abbé Baudet, curé de St-Laurent-des-Eaux.

    L’abbé Blondeau, pro-curé de Nouan-le-Fuzelier.

    L’abbé Gru, vicaire à Salbris.

    L’abbé Meunier, curé de Monthou-s/Cher.

    M. l’abbé Picault, prêtre à Vendôme.

    Ce soir – à 7 heures ¾ - il y a à la cathédrale, chants, allocution par M. l’abbé Rotier, aumônier de l’Hôtel-Dieu, salut et prières pour la France. Nous y allons, Robert et moi ; il y a foule. Les soldats sont spécialement invités, ils sont peu nombreux. Il est vrai que cette cérémonie est trop tardive ; déjà le 113e, le 313e, et le 39e sont partis. Alors ? Il fallait faire ces cérémonies dès le début de la mobilisation.

    On y chante une superbe poésie de M. le chanoine Augereau, le fin poète, l’esprit délicat, toujours en éveil, observateur remarquable et juste, orateur recherché. Cette poésie sera chantée tout le temps de la guerre, elle est très belle et produit grand effet.

    Elle est intitulée cantique pour les fidèles pendant le temps de la guerre.

                                            Air : Partez, hérauts (Gounod)

    Puisque le Droit, puisque la Paix du monde

    sont menacés par l’Empire allemand,

    c’est Dieu qui veut que la France réponde

    au César fou qui provoque et qui ment.

    Il n’a qu’un rêve : oui, que l’Europe tremble

    en admirant son orgueil exalté…

    Les alliés sauront défendre ensemble

    la justice et la liberté.

                     Cantique

                     Refrain

    Nous le croyons : Dieu protège la France ;

    C’est le pays le plus cher, le plus beau !

    Et nous devons chanter : vaillance et confiance !

    Pour Dieu ! pour le drapeau…

                     1

    La Nation se lève toute entière

    Comme un seul homme, à l’appel des combats ;

    le flot prussien rugit à la frontière,

    le flot prussien ne repassera pas…

    à nos foyers le courage des femmes

    a refoulé les larmes dans les yeux ;

    Elles prieront du meilleur de leurs âmes,

    et nous serons victorieux…

                     2

    Il y en a que, de ses noires ailes,

    la mort effleure et qu’elle a délaissés ;

    vers vous nos mains se tendent, fraternelles,

    braves soldats, héroïques blessés…

    Vous nous direz comment pour la Patrie,

    ayant offert à Dieu, d’un grand désir,

    ayant offert, sans regret, votre vie,

    vous acceptez de tant souffrir…

                     3

    Près de la Croix, mieux résignés, plus sages,

    jusqu’à la fin, nous aurons plein le cœur

    moins de sanglots que de vibrants hommages

    pour ceux qui sont tombés au champ d’honneur.

    Ils ont payé de leur sang la victoire ;

    ils ne seront nulle part jamais seuls,

    et les drapeaux, dans un frisson de gloire,

    leur font le plus fier des linceuls…

                     4

    Oh que la guerre, oh ! que l’œuvre de haine

    soit, par le ciel, détruite sans retour !

    Avec nos sœurs, l’Alsace et la Lorraine,

    nous chanterons le renouveau d’amour.

    Entre Français le souffle des batailles

    va déchirer les nuages épais…

    O mon pays, tu revis, tu trésailles,

    sous le divin baiser de Paix !...

                                  Blois, le 19 août 1914

                                  Albert Augereau