• 1476 : Mariage royal à Montrichard

    1. Vitrail_Jeanne-de-Valois

    Sainte Jeanne de Valois, détail d'un vitrail de la cathédrale de Bois, milieu du XIXe siècle (C) M. Pène.

     

    Jeanne de France, célébrée en 2014 pour les 550 ans de sa naissance, a vécu sur le territoire du Loir-et-Cher un des événements majeurs de sa vie : le 8 septembre 1476, cette fille du roi Louis XI épouse à Montrichard le jeune duc Louis d’Orléans, futur Louis XII.

     

    Cet événement revêt une importance particulière pour l’histoire de France, parce qu’il est la froide illustration du jeu matrimonial du roi de France, mais surtout pour son issue, un procès en annulation d’un grand retentissement.

     

    Élevée loin de la cour, recluse dans le château de Lignières en Berry et frappée de plusieurs infirmités, Jeanne n’a pas été sollicitée pour donner son accord à un mariage qui est l’œuvre politique de son père. Quant à Louis d’Orléans, il subit la pression de Louis XI qui tient à faire rentrer dans l’obéissance cette branche cadette sujette aux rebellions. Dès 1473, le roi sollicite du pape Sixte IV une dispense pour marier deux enfants proches par la parenté naturelle (cousins issus de germains) et spirituelle (le duc d’Orléans est le filleul de Louis XI).

     

    La cérémonie s’est déroulée le 8 septembre 1476 au matin, dans la chapelle du château de Montrichard (aujourd’hui église Sainte-Croix) où a eu lieu deux ans plus tôt un autre mariage royal, celui de la sœur aînée de Jeanne, Anne de France, avec Pierre de Beaujeu. L’officiant est François de Brilhac, évêque d’Orléans et abbé de Pontlevoy. Le roi est absent mais s’est fait représenter non seulement par la reine Charlotte de Savoie, gage de solennité et de validité de l’évènement, mais aussi par son chancelier Pierre Doriole qui produit les dispenses pontificales. La mère du duc d’Orléans, Marie de Clèves, n’a pas non plus assisté au mariage, sans doute en signe de désapprobation. Ce sont donc des noces d’une étonnante modestie qui sont célébrées à Montrichard.

     

    Restée dans le bas de la chapelle, près de la porte, la petite mariée de 12 ans, dans sa robe de drap d’or rouge, est accompagnée par son fiancé de 14 ans en larmes ; l’évêque obtient de Louis d’Orléans un difficile consentement qu’il lui a fait confirmer à deux reprises, pour se prémunir des contestations. Après la messe dite debénisson, les réjouissances s’organisent, malgré la tristesse des époux, autour d’un banquet nuptial donné au château. Peu de temps après, Jeanne de France, nouvelle duchesse d’Orléans, fait son entrée officielle à Blois, résidence ducale, avant de retourner vivre à Lignières où elle passe seule les premiers temps de son mariage. Louis d’Orléans ne laissera cependant pas de la dédaigner pendant 22 ans de vie conjugale.

     

    Ce mariage, si peu heureux qu’il soit, fait de Jeanne la reine de France, lorsque son mari succède en 1498 à Charles VIII sous le nom de Louis XII. Néanmoins, aussitôt libéré des contraintes familiales, Louis XII suscite contre elle un procès en nullité de mariage, qui se déroule en la cathédrale Saint-Gatien de Tours. Il s’agissait pour Louis XII d’avoir toute latitude pour épouser la veuve de son prédécesseur, Anne de Bretagne, et ainsi annexer son précieux duché. Le roi obtient satisfaction le 17 décembre 1498 lorsque le mariage est cassé par le pape Alexandre VI pour défaut de consentement. Louis XII s’unit alors à Anne de Bretagne le mois suivant et Jeanne, qui n’a désormais juridiquement jamais été mariée au roi, reçoit le duché de Berry en compensation...

     

    Installée à Bourges, Jeanne de France se consacre à sa vocation religieuse et fonde l’ordre féminin de l’Annonciade voué à l’imitation des vertus de la Vierge Marie, pour laquelle Jeanne a une profonde dévotion depuis l’enfance. Elle y prononce ses vœux en 1504, un an avant sa mort. Là, alors qu’elle quitte le siècle, Jeanne fait don aux religieuses des derniers vestiges de ses noces de Montrichard, ses deux robes de mariage transformées en chasubles. Elle est canonisée en 1950 sous le nom de Jeanne de Valois.

     

    Pour aller plus loin :

     

    - Transcription du procès en nullité du mariage dans René de MAULDE, Jeanne de France, duchesse d’Orléans et de Berry (1464-1505), Paris, 1883. (cote : GG 68)

    - Article de Françoise MICHAUD-FRÉJAVILLE, « Rumeurs autour du mariage de Jeanne de France et de Louis d’Orléans »,Bulletin de la Société Archéologique et Historique de l’Orléanais, n° 155, 1er trimestre 2008, p. 55-60. (cote : PER 887)

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