Paul Robert-Houdin, Le circuit des châteaux lumineux. Brochure, [1952]. détail 3. ADLC 90 J 195


En 1951, les châteaux de la Loire bénéficièrent pendant la saison touristique d’illuminations projetant les visiteurs dans une féerie nocturne hors du temps. Expérience réussie qui vit l’éclosion, avec la reprise du tourisme dans l’après-guerre, d’un spectacle d’un nouveau genre, premier son et lumière de l’histoire, qui eut lieu au château de Chambord en 1952. Cette année-là, trois circuits de présentation nocturne avec l’illumination de plus de trente monuments et sites de Loir-et-Cher furent également mis sur pied : un circuit du nord, du sud et de la Vallée de la Loire au centre. La carte détaille le tracé des trois itinéraires.

Jean Martin-Demézil, directeur des Archives départementales de Loir-et-Cher de 1941 à 1978, contribua pour une large part au son et lumière de Chambord. Présent à Monaco deux ans plus tard pour les Journées de l’éclairage, Jean Martin-Demézil évoque dans sa communication aux congressistes, les circonstances qui présidèrent à la création du premier son et lumière, en s’appuyant sur le rapport de Paul Robert-Houdin, conservateur du château de Chambord et architecte des Monuments historiques : « Le château de Chambord, le plus illustre des châteaux de la Loire, est un palais un peu mystérieux qui a été conçu et créé pour les fêtes. Tout semble le destiner à une présentation nocturne où la lumière des projecteurs pourra à profusion inonder son architecture et faire apparaître sous un jour nouveau toute la fantaisie de la pierre de ce magnifique palais. […] Mais on peut faire mieux à Chambord, et y donner un véritable spectacle de féérie où les jeux de lumière pourront, avec harmonie, se livrer à toutes les fantaisies que permet la technique moderne. Enfin, une sonorisation me paraît indispensable, car nous envisageons la création d’un véritable scénario, où des commentaires et des musiques enregistrées doivent compléter l’éclairage du monument ».

Poursuivant son bilan de l’expérience, Jean Martin-Demézil choisit de résoudre le dilemme qui taraude l’historien - amené à faire parler un monument ! - éviter de trahir la « vérité historique », en la transposant en « vérité poétique ». Nul meilleur défenseur de cette nouvelle formule touristique que sa plume évocatrice qui sut conquérir son auditoire majoritairement préoccupé par l’aspect technique du spectacle : « Les visiteurs du soir […] retrouvent, grâce aux sortilèges de la nuit, un peu de leur âme enfantine. La fraîcheur de leur sensibilité redevient disponible. Pour autant que la technique du spectacle s’efface, laissant le spectateur tout seul devant une vérité poétique nouvelle faite de musique, de lumière et de mots, cette vérité peut s’imposer à lui ». Jean Martin-Demézil ne s’est trompé qu’une fois, c’est lorsqu’il écrit : « Oh ! ne nous faisons pas trop d’illusions… comme toutes les modes, sans doute celle-ci sera-t-elle éphémère ».


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